mercredi 28 décembre 2016

Nicole Ferroni | la contradiction de fêter Jésus et ne pas accueillir les migrants | transcription

À quelques jours de Noël, grâce à un extrait de l'Évangile, Nicole Ferroni s'interroge à nouveau sur un sujet qui lui est très cher, c'est-à-dire celui de la crise des réfugiés. 

Aidez-vous grâce à la transcription ci-dessous !

Cliquez ici pour écouter la chronique sur la page officielle de France Inter.

nicole ferroni france inter


↓ Transcription :



- On retrouve Nicole Ferroni. Bonjour Nicole.
- Bonjour Pierre. 
- Nicole, on me dit que vous êtes gênée ce matin. 
- Oui, exactement, écoutez, je suis un peu gênée quand je vois comment notre invité du jour a réussi à revenir sur les souvenirs de toute une vie alors que moi, voyez-vous, j'ai déjà du mal à me rappeler ce que j'ai fait cette semaine. Or, du coup, pardon si ma rétrospective1 à moi est beaucoup plus courte. Voici mes souvenirs de ces derniers jours.

Alors cette semaine, comme dans beaucoup d'autres endroits en France, dans ma famille nous avons fêté Noël et à cette occasion, mon père, ma sœur, mes nièces et moi, nous avons été entraînés par ma mère au culte de Noël. Or, je dis bien culte et non pas messe puisque contrairement à mon père, qui est de culture catholique, ma mère, elle, est protestante. D'ailleurs, elle proteste souvent sur le sens du message biblique. Souvent, elle dit "Oui, mais attend, si un extraterrestre, il vient sur Terre et qu'il nous entend raconter qu'un homme a été sacrifié il y a 2000 ans pour nous sauver de nos péchés, franchement l'extraterrestre va dire
Mais vous êtes complètement fous !”".

Mais ces protestations n'empêchent pas ma mère d'être plutôt pratiquante, parce qu'elle aime bien chanter à la chorale2, qu'elle aime bien se réunir avec d'autres humains, surtout parce qu'elle est très très fière du nouveau pasteur3, dernier cri de la paroisse, un Uruguayen avec des cheveux longs nommé Roberto. Et donc ce Noël, une fois séquestrée par ma mère au culte de Noël, j'ai quand même pris la peine d'écouter Roberto, qui avait fait le choix de concentrer son message de Noël sur cette simple phrase de la Bible, extrait de l'Évangile selon Saint Luc, chapitre 2, verset 7, phrase qui parle de Marie, la mère de Jésus, en ces mots “Elle mit au monde son fils premier-né, elle l'emmaillotta et le coucha dans une mangeoire4, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle.” Et Roberto nous a fait nous interroger sur le pourquoi il n'y avait pas la place. Qu'est-ce qui occupe la place dans nos vies, au point qu'on laisse accoucher une femme dans une étable ? Et pourquoi on n'arrive toujours pas à faire de la place actuellement ?

Vous allez me dire “Mais Oui mais Nicole, vous dîtes actuellement mais la naissance de Jésus, l'enfantement par sa mère Marie, c'était il y a 2016 ans”. Oui, sauf que du genre de Marie, on en a encore aujourd'hui, notamment dans les Alpes-Maritimes. Oui, en effet, il n'y a pas si longtemps, moi, je suis allée travailler dans les Alpes-Maritimes et à cette occasion j'ai rencontré un monsieur qui s'appelle Hubert Jourdan et qui a fait le choix avec sa collègue Francesca d'accueillir sur son terrain et son budget une vingtaine de réfugiés. Et parmi ces réfugiés, il y avait une maman et son petit garçon d'environ 6 mois, une maman qui comme Marie, la mère de Jésus, s'était déplacée alors qu'elle était enceinte, une maman qui comme Marie, la mère de Jésus, avait dû accoucher en chemin, car comme Marie on avait pas pu lui faire de la place. Et le problème c'est qu'on risque de pas lui faire de la place, car le député des Alpes-Maritimes, M. Sauty, est franchement assez opposé à l'accueil des réfugiés. Tellement opposé d'ailleurs qu'il dénonce à la justice les gens susceptibles de les accueillir, justice qui n'a de toute façon pas perdu de temps, puisqu'elle attend de pied ferme5 Cédric Herrou, agriculteur, et Pierre Allain Mannoni, enseignant, qui comparaîtront tous dès la semaine prochaine pour avoir accueilli sur leur temps et leur donné des réfugiés et devront se justifier aux pieds du Prêtre, Prêtre étant bien sûr le nom du procureur de la République qui les poursuit, Jean-Michel Prêtre.

Et moi, ça m'a fait de la peine, pas tellement pour les traîner en justice6, mais pour M.Sauty, parce que je me suis dit “Mince, voilà un député qui est très attaché aux racines chrétiennes de son pays, au point qu'il voulait cette année les inscrire dans la Constitution, mais qui ne voit pas que si aujourd'hui il avait la chance de se retrouver nez à nez avec Jésus, il serait capable de le renvoyer dans son pays. Il ne voit pas que si Jésus de Nazareth avait eu le malheur de naître 2016 ans après lui-même et avait eu l'occasion de se reposer dans une étable niçoise, alors qu'il est, M. Sauty aurait renvoyé le bœuf au tribunal, l'âne en garde-à-vous7 et les rois mages au poste pour avoir été complices de son accueil.

Alors voilà un rôle des choses, de prendre le sens chrétien et de ne pas le faire. Après, bien sûr, ce n'est pas facile de faire. Ma grand-mère paternelle, elle est aussi quand elle avait mis la place du pauvre à la table de Noël et que son fils, mon père, à l'âge de 8 ans, lui avait ramené un vrai pauvre à la maison, bien sûr, elle avait fait une drôle de tête. Oui, c'est pas facile, mais c'est pour ça que M. Sauty devrait être très content qu'il existe des gens qui défendent à sa place les valeurs chrétiennes qu'il prétend semer et qu'il sabote pourtant.  


Il devrait être heureux que ce qu'il prend dans les missives8, d'autres le fassent en époussetant des champs, car l'amour du prochain n'a pas beaucoup de valeur tant que l'idée dans le vent n'est pas suivie d'une main à la patte9.



Quelques éclaircissements :

1rétrospective : chronologie de l'histoire, des faits qui se sont produits jusqu'à présent.
2chorale : groupe de personnes qui chantent des œuvres musicales.
3pasteur : ministre protestant.
4mangeoire : auge où mangent les bêtes.
5de pied ferme : expression indiquant une forte résolution.
6traîner en justice : porter quelque chose (une affaire, un litige) devant les tribunaux.
7garde-à-vous : position adoptée par les militaires quand on leur donne un ordre.
8missive : lettre, message.
9mettre la main à la patte : s'engager personnellement dans une action.



M.me Ferroni aime toujours terminer en beauté. J'espère que cette chronique vous a plu. Pour en regarder d'autres visitez :
N'oubliez pas d'aimer ma page sur facebook (en cliquant en haut à gauche) ou directement ici. Partagez si ça vous a plu pour soutenir le blog ! ;)

Continuez à étudier le français entre quat'z'yeux !

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire