mardi 8 novembre 2016

Nicole Ferroni - France Inter - Le CETA, quand l'Europe et le Canada se partagent un bon gros steak (02/11/16) avec transcription - niveau avancé

Entraînez-vous à la compréhension de l'oral avec cette chronique de M.me Nicole Ferroni, humoriste et comédienne, diffusée sur France Inter pour la matinale Le 7/9 de Patrick Cohen, qui date du 2 novembre 2016.


Vous pouvez faire appel à la transcription et au petit dictionnaire ci-dessous !

Je vous conseille fortement de vous abonner à la chaine Youtube de M.me Ferroni et de France Inter pour d'autres vidéos intéressantes comme celle-ci. Ne ratez pas ses chroniques le mercredi matin !



Le CETA, quand l'Europe et le Canada se partagent un bon gros steak


Transcription :

Et maintenant ta ta tan...

Ta ta tan..

Nicole Ferroni arrive. Nicole, on me dit que vous êtes apaisée.

Mais oui, voyez, je suis apaisée. Aujourd'hui je vais effectivement éviter de mettre la charrue avant la bouche* et de passer la meule, à la meule le sujet du jour, c'est vrai, et essayer de l'expliquer et donc je vais profiter de la présence de notre secrétaire d'État au commerce, M. Fekl, pour parler du CETA.
Alors, le CETA, qu'est-ce que c'est ? C'est un traité de libre-échange entre l'Europe et le Canada, qui comme tous les traités de libre-échange est un genre de pacte entre copains, par lequel les deux partenaires risquent de devenir plus copains, c'est-à-dire plus que partager le pain : ils veulent désormais partager un steak. Ainsi, l'Europe et le Canada, en s'asseyant à une même table et en se facilitant la vie entre eux au détriment des autres, notamment par l'abaissement des droits de douane, prévoient de se tailler dans le dos du commerce mondial un bon gros steak, de nouveaux consommateurs cuits à point et de nouveaux investisseurs bien saignants pour faire comme les body-builders de la gonflette, c'est-à-dire se muscler à nouveau pour co-lancer leur croissance.
Alors, même si la logique aurait voulu qu'on arrive un jour à, comment dire, à se sentir un citoyen du monde, ou plutôt que citoyens de B2, de B2, de pays, j'entends, je peux comprendre qu'en parlant de disette, l'Europe et le Canada aient eu envie d'un bon steak. Bon.
Par contre la chose que je ne comprends pas en regardant le steak de CETA, M. Fekl, c'est pourquoi on a choisi de laisser le ténia dedans, car dans le steak du CETA il y a un ténia, un ver solitaire, alors quand je dis ver solitaire je ne parle pas d'un écologiste (vert) qui se serait perdu tout seul, je parle de ce parasite qui s'incruste* dans la viande de porc ou bœuf et qui fait que lorsque l'homme mange la viande infestée, au lieu d'être nourri par elle, par ses protéines et les vitamines contenues, s'en fait déposséder par le parasite qui en bénéficie. Et pour moi le CETA, voilà dans le CETA, il y a justement un parasite sous la forme de, de ce dont vous avez parlé, les tribunaux d'arbitrage. Comme vous savez, les tribunaux d'arbitrage, donc sont au-dessus des états, et ils pourront être saisis par les investisseurs étrangers pour attaquer les états s'ils estiment qu'un changement de loi porte trop de préjudices à leurs bénéfices. Et donc moi je me disais « Eh le ver est dans la viande ». Et vous, là, vous allez me dire « Mais non Ferroni, bien sûr ces tribunaux sont des vers mais rassurez-vous, ce ne sont pas des ténias, ce sont des appâts. Ce sont juste des vers à petit sang qu'on met au bout d'une ligne en vue d'attraper ce gros poisson qu'on appelle investisseur, car pour appâter le gros investisseur, rien ne vaut à un système juridique que le rassure et qui dit que s'il y avait un changement de loi dans l'état, et qu'il venait à le léser, il pourrait être compensé ». Et moi je vais dire « Non, là ce n'est pas tellement lésé, c'est zélé qu'il faudrait être ». Il faut faire preuve de beaucoup de zèle pour demander d'être compensé pour un changement de loi, car, que je sache, ni les entreprises locales, ni les citoyens n'ont, hélas, ce moyen. En effet, quand par exemple moi, la loi rend une mutuelle imposable, je subis un préjudice sur mon pouvoir d'achat, à temps prévu seulement de me compenser. Non, pourtant en tant que consommatrice, je suis un acteur économique majeur, car avec mes 500 millions d'autres Européens, c'est moi qui incarne la croissance.
Eh non, voyez, je me dis mais je vois pas pourquoi il serait normal de compenser la multinationale, plutôt que les citoyens, surtout quand il est prévu que les pertes des premiers, les multinationales, soient faites avec l'argent des seconds, le mien, le vôtre, bref celui que tous les citoyens versent à l'état.
Et c'est pour ça que je dis, mais en fait les états sont un peu masos. Ils sont en train de créer un outil pour s'amputer des deux bras, de se lancer un petit peu comme dans un élevage de ténias, car l'argent que ces états ont péniblement récolté auprès des citoyens, argent destiné à faire fonctionner leur pays, financer l'éducation, les systèmes de santé et de sécurité, seront de leur plein gré ou pourrait être reversés par ces tribunaux à des entreprises privées. Et moi j'ai envie de dire mais Europe, Canada à quoi te sert de courir derrière des nouvelles parts de marché, si c'est pour nourrir tes parasites. Moi, si j'ai envie de manger un bon steak, jamais je ne laisserais des ténias avec.
Et du coup, M. Fekl, puisque je me disais voilà, puisque nous les citoyens nous sommes visiblement tellement forts qu'on nous croit capables d'absorber le choc de changement de loi sans broncher,
tout en jouant la béquille des petites multinationales blessées, je me disais mais peut-être inspirez-vous de cette force, pour aller justement au prochain conseil interministériel du commerce la tête haute et le couteau aiguisé et vous allez dire « Nous ne laisserons pas les voilons être gaulois à notre  place, intraitables avec ce traité du CETA, je saurais le boucher mais le boucherie de qualité » et nous « Fekl Fekl Fekl », car oui les citoyens veulent la pomme sans le ver, la medaille sans le revers, et donc vous allez nous tailler un bon filet minion mais un filet qui en plus de contenir le gros poisson, nous tiendra au cœur et à l'esprit, car les citoyens ont faim de justice et de bon sens.

Nicole Ferroni, c'était saignant hein, Nicole, hein.


Petit dictionnaire :

 
mettre la charrue avant la bouche : jeu de mots qui rappelle l'expression "mettre la charrue avant les bœufs", qui veut dire faire les choses dans le désordre, en faisant avant ce que l'on devrait faire après.
meule : outil agricole qui sert à broyer, à polir, à aiguiser (pour voir toutes les définitions de ce mot, cliquez ici)
gonflette : faire de la musculation, généralement pour des raisons esthétiques.
disette : pénurie, manque d'un bien indispensable.
appât : ce qui tente, mais aussi pâture pour attirer le gibier ou les poissons.
appâter : attirer, séduire.
zélé : qui a du zèle, c'est-à-dire de l'ardeur, du dévouement.
sans broncher : sans réagir, sans rien faire.
béquilleoutil auquel on s'appuie pour mieux marcher.

Pour la chronique de M.me Ferroni sur l'élection de Trump, voici le lien.
Et voici celle de M.me Vanhoenacker.

J'espère que cette vidéo vous a plu. Si vous avez remarqué des coquilles ou si vous avez des questions, n'hésitez pas à laisser un commentaire ci-dessous et je répondrai tout de suite. Pour d'autres transcription, visitez le portail compréhension de l'oral ci-dessus !

Continuez à étudier le français entre quat'z'yeux ! 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire