Cet exercice de compréhension de l'oral requiert un haut niveau de compétence. Vous aurez donc à votre disposition les sous-titres du dialogue, que je vous conseille d'utiliser lors de la deuxième (ou troisième) écoute.
Il s'agit du billet de Nicole Ferroni du 10/02/2016 au titre Réforme de l'orthographe, rions un peu, diffusé par la matinale Le 7/9 de Patrick Cohen sur France Inter.
Celui de la réforme de l'orthographe est un sujet d'actualité très controversé que vous pouvez retrouver lors d'un examen comme le Dalf. Par conséquent, je vous conseille d'écouter attentivement et d'aller vous renseigner un peu plus sur Internet !
Pour télécharger les sous-titres en format .srt, cliquez ici. Si vous ne savez pas comment synchroniser les sous-titres, voici un peitit guide. Pour le fichier en format .odt, cliquez ici.
Patrick
Cohen : Nicole, vous êtes gênée, avec un flexe sur le
premier E.
Nicole
Ferroni : Oui, oui, complètement, complètement. Écoutez,
je suis un peu gênée vis-à-vis de notre invité, M. Emmanuel
Carrère, puisque j'ai vu en face de votre nom ce mot écrivain et là
je me suis dit..
Emmanuel
Carrère : Et vous avez remarqué que j'avais une excellente
orthographe ?
Nicole
Ferroni : Voilà,
exactement! Et je me suis dit “Mais le pauvre! Est-ce que lui doit
savoir comme écrire l'écrit qu'il pousse par sa plume quand il
décrit le monde, alors que la société, de l'écrivain, elle voit
surtout le vain, le, le.. Ah bon vous êtes écrivain? Mais sinon,
votre vrai métier c'est quoi ?”
Et
bah, son métier, à M. Carrère, c'est de manier les mots, les mots
qui sont comme des mains, qui sont caresses, qui sont coups de
poings, qui sont ce qui vous touche, et c'est pour ça que quand les
gens n'ont plus de mots, et bah ils en reviennent aux mains.
Et
du coup je me disais “Mais le pauvre! Qu'est-ce qu'on fait avec son
outil de travail avec cette réforme de l'orthographe ?” On prend
les mots, on les décape, on les retaille, pour certains on les
malmène. Après attention, tout n'est pas mauvais dans cette
réforme. Il y a des aspects où elle gagne en cohérence. Je pense
notamment au sagefemme qu'on a fusionné en un seul mot, sage et
femme étant un pléonasme, il n'y avait effectivement aucun sens à
les laisser en deux mots séparés. Mais, par contre, la
chauve-souris, depuis sa fusion qu'elle doit se prononcer la
chauvesouris, là je n'ai pas compris.
Pas
compris non plus la fin de ce temps où les U, les I portaient sur
leur tête un petit circonflexe, comme nous on porte le médaillon de
notre mère-grand, autour du cou par héritage. Et je me disais “Mais
non, quitte à faire une réforme, qu'on rigole un peu et qu'on
s'attaque plutôt à la cédille”, comme ça sur les devantures
d'entreprises de BTP, au lieu de lire maçonnerie générale, on lira
maconnerie* générale et là ça sera drôle. Et en attendant,
hélas, cette réforme ne fait pas rire tout le monde et le tollé
provoqué, si intolérable pour le gouvernement qui s'est senti
obligé d'écrire sur une page spéciale de son site “Réforme de
l'orthographe, il ne revient pas au ministère de l'éducation
nationale de déterminer les règles en vigeur de la langue
française. Ce travail revient à l'Académie française depuis
Richelieu”, Richelieu sans trait d'union, signe que la réforme est
déja en application. Et là je me suis dit “Ah bon, c'est la
faute de l'Académie française!” et je suis donc allée voir qui
avait signé ces rectifications. Il s'agit de Maurice Druon, auteur
des Rois maudits, mort en 2009 et là je me suis dit “Mais
attendez, les rectifications sont publiées en 2015, et c'est de la
faute à M. Druon mort 6 ans plus tôt, mort à une époque où le
croquemort avait encore un trait d'union et où lorsqu'on se mêlait
de ses oignons, on le faisait avec un I bien arrogant”.
Et
oui, les absents ont toujours tort mais le gouvernement a inventé,
les coupables sont toujours morts, comme ça ça évite qu'ils se
défendent dans la polémique, car les polémiques, c'est comme le
train, l'une peut cacher l'autre, et si même parfois elles
déraillent, elles ont souvent une destination précise, électorale,
idéologique. Et moi je dis “Oui mais laquelle ? À quoi peut bien
servir cette réforme ?” Et j'essayais d'y réfléchir mais je n'y
arrivais pas, parce que j'essayais d'abord de comprendre, vous savez
les dernières règles pour les impôts en 2015 éditées par la
direction générale des finances publiques, notamment cette phrase
“Il ne faut pas déclarer les sommes versées au titre de
l'intéressement des salariés à l'entreprise dans la limite d'un
montant égal à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale
affectée à la réalisation d'un plan d'épargne salariale et, dans
les mêmes conditions et limites, les dividendes des actions de
travail attribués aux salariés des sociétés anonymes à
participation ouvrière régies par les lois du 26 avril 1917.” Et
je me suis dit “Oh la la, mais je ne comprends rien” Écoutez, je
vais d'abord m'occuper de ma chronique parce que ** des impôts sont
tellement compliqués que je m'en occuperai après, quitte à me
faire majorer. Et là je me suis dit “Mais voilà la raison, quelle
formidable stratégie pour l'état d'économiser de l'argent en
entretenant une grosse barrière de vocabulaire, quand on sait qu'en
France 5 milliards d'euros de RSA ne sont pas versés aux personnes
éligibles car une personne sur deux n'en fait pas la démarche, du
fait de la trop grande complexité de celle-ci”. Je me suis dit
“Mais quelle bonne idée de rendre les démarches de plus en plus
complexes, en même temps qu'on rend l'éducation des enfants de plus
en plus simplex, quelle bonne idée de creuser le gouffre entre
l'école et la vie, entre le monde du nénufar, où le nénufar ne
prend qu'un F et celui de l'effarante fraude fiscale en prent
quatre, et comme ça nous nous entasserons entre les deux rives de ce
gouffre, toujours plus large, un tas de gens perdus et qui ne
comprennent pas ce que raconte l'État et qui laisseront plein
d'argent, faute d'avoir compris, mais moi, cher État, grâce à ta
réforme, j'ai appris plein de nouveaux mots comme bélître,
besicles, velarium et sconse, le nom commercial de la fourrure de la
mouffette. Alors tremble, État, car par ta réforme, si tu
t'éloignes de moi, moi je viens à toi.
Pour écouter la chronique sur la loi Pinel, voici le lien.
Pour savoir ce que M.me Ferroni pense au sujet de l'orthographe, cliquez ici
Petit dictionnaire :en venir aux mains : commencer à se battre.
décaper : rendre sa jeunesse, son éclat à quelque chose. Nettoyer en ôtant la couche superficielle.
malmener : faire subir un mauvais traitement, détériorer.
sagefemme : personne qui aide une femme lors de l'accouchement.
BTP : secteur "bâtiment et travaux publics".
maçonnerie : l'art de bâtir des constructions.
maconnerie : jeu de mots péjoratif où, en éliminant la cédille dans le mot maçonnerie, on crée un nouveau terme qui renferme ma et connerie (chose stupide).
tollé : indignation.
croquemort : personne dont le travail consiste à transporter les morts au cimitière.
se mêler de ses oignons : penser à ses affaires et pas à ceux des autres. Selon la réforme de l'orthographe, le mot oignon doit s'écrire ognon à cause du I qu'on ne prononce pas dans l'oral.
dérailler : sortir des rails, de la route. Sortir de sa place, en parlant de la chaîne d'un vélo.
RSA : revenu de solidarité active ; montant assuré aux personnes qui n'ont pas de revenu.
éligible : qui jouit des éléments requis par quelque chose.
nénufar : genre de plante aquatique à feuilles larges et à fleurs jaunes ou blanches.
bélître : homme de rien, mendiant.
bésicles ou besicles : lunettes sans branches qui se fixent au nez.
velarium : espèce de tente qui était utilisée pour couvrir les cirques.
Voilà. J'espère que la vidéo vous a plu. Si vous avez des questions ou si vous avez remarqué des coquilles, n'hésitez pas à laisser un commentaire.
Continuez à étudier le français entre quat'z'yeux !
* cimetière
RépondreSupprimerBah, cette femme parle vraiment très très vite :))
Oui, effectivement elle parle à une vitesse étonnante ! Merci pour votre correction.
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